Définition de CHENU, UE
Prononciation : che-nu, nue
DÉFINITIONS
1
Tout blanc de vieillesse. Une tête chenue.Hommes, enfants, les personnes chenues Lamentent pêle-mêle aux places et aux rues
de GARN. dans M. Ant. IV
Pour moi, je cède au temps, et ma tête chenue M'apprend qu'il faut quitter les hommes et le jour
de MAINARD dans dans RICHELET
Ce vieillard chenu qui s'avance, Le temps dont je subis les lois
La vieillesse.... Sous mes faux cheveux blonds déjà toute chenue
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Épît. X
Vos ans chenus
de GARN. dans les Juives, III
2
Sémantique : Fig. Couvert de neige.Quoique les Alpes chenues Les couvrent de toutes parts
de François de MALHERBE dans II, 2
Montagnes.... Dessus vos têtes chenues, Je cueille au-dessus des nues Toutes les fleurs du printemps
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans XXI, 289
[Superbes monts] Vous qui sur vos cimes chenues Voyez, dans le vague des airs, Les tonnerres et les éclairs
de GODEAU dans Poésies, ps. 148, dans RICHELET
3
Sémantique : Par analogie.Il ne va point fouiller aux terres inconnues, à la merci des vents et des ondes chenues
de RACAN dans Pastorales.
Qui compterait plutôt les arènes menues Que baigne l'Océan de ses vagues chenues
de GODEAU dans Poés. Égl. v.
4
Arbre chenu, arbre dont la cime est dépouillée.5
Sémantique : Fig. Hors d'usage.Les mêmes choses avaient besoin d'être récrites dans le français nouveau qui devenait bien vite vieux et chenu
de VILLEMAIN dans Préf. du Dict. de l'Acad. 1835
6
Dans le langage populaire, chenu se dit pour excellent, fort, riche, à cause que ce qui est vieux s'est amélioré. Voilà du vin qui est chenu. Cet emploi est ancien dans Paris, Leroux en parle dans son Dict. comique.Nature : Substantivement. C'est du chenu.
HISTORIQUE
1
XIe s.Et Blancandrins i vint au canu peil
dans Ch. de Rol. XXXVII
De Charlemagne qui est canuz et vielz
dans ib. X
Fiers est li reis à la barbe canue
dans ib. CCLXVII
2
XIIe s.Toz fu li poilz chenus
dans Ronc. p. 11
De Charlemaine qui fu chenus et blans
dans ib. p. 26
Salomon [il] en apele et Buevon le chenu
dans Sax. XXVIII
Assez i ad trové e joeuenes et chanuz
dans Th. le mart. 38
3
XIIIe s.Grant duel [deuil] font pour Bertain li joene et li chenu
dans Berte, CI
Mès foi que doi Deu et saint Jorge, J'ai tote chenue la gorge
dans Ren. 16008
Et Tybert [le chat].... Si ot toz les grenons chanuz, Et les denz trenchanz et aguz, Et les ongles grans por grater
dans ib. 1955
Toute sa teste estoit chenue, Et blanche cum s'el fust florie
dans la Rose, 346
Dans Pierres li ermites à la barbe canue
dans Ch. d'Ant. VIII, 1134
Et amenoient avec eulx un homme de grant vieillesce tout chanu
de Jean, PRINCE DE JOINVILLE dans 242
Et si n'estoit mie pelée La penne qui d'ermine fu ; D'un sebelin noir et chenu Fu li manteax au col coulez
dans Fabliaux mss. p. 238, dans LACURNE
4
XVe s.Comme ung chat, suis vieil et chenu
de Charles D'ORLÉANS dans Rond.
5
XVIe s.Je rendz graces à Dieu de ce qu'il m'a donné pouvoir veoir mon anticquité chanue reflourir en ta jeunesse
de François RABELAIS dans Pant. II, 8
Non autrement qu'on voit parmy les nues Les haults sourcils des grands Alpes chenues
de Joachim DU BELLAY dans III, 5, recto.
La foy chenue, alors non violable, Tiendra le lieu des punissantes loix
de Joachim DU BELLAY dans III, 6, verso.
Mesme en ces tant jeunes ans, Ceste vertu tant chenue
de Joachim DU BELLAY dans III, 15, verso.
Ces choses n'ont d'appuy qu'en la barbe chenue et rides de l'usage
de Michel de MONTAIGNE dans I, 118
[Léandre] dedans l'escume chesnue S'enivra du flot amer
de Jacques YVER dans p. 577
Depuis qu'il fu devenu vieil et chenu
de Jacques AMYOT dans Caton, 10
ÉTYMOLOGIE
1
Provenç. canut ; ital. canuto ; du latin canutus, dérivé de canus, pour casnus ; sanscrit, kas, briller : ce qui est blanc est brillant (voy. CANDEUR).